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    Une photo de Margimond sur Carnet de dévoyage

     

    Aujourd'hui, le temps est gris, il pleure par instant

    Il joue à cache cache.

    Avec une branche de cerisier du japon

    Qui hésite à fleurir.

    Et si la neige venait, réfléchit le bourgeon rosissant

    Ce serait bien un temps de février

     

    J'ai bien encore un peu de temps

    Avant que de me montrer plus avant.

    Quand j'aurai mis le nez dehors,

    Je ne pourrai plus rentrer dedans.

    Alors c'est dit, je prends mon temps.

     


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    Cette chanson d'Anne Sylvestre en répons au texte, "L'enfant qui dormait dans la cave", nous fait monter cette fois au grenier quand la maltraitance devient une institution nationale.

    Fille d'Albert Beugras bras droit de Jacques Doriot pendant l'Occupation à la tête du Parti populaire français, Anne Sylvestre est la sœur de l'écrivaine Marie Chaix. Le Parti populaire français ou PPF (1936-1945), fondé et dirigé par Jacques Doriot, était le principal parti politique d’inspiration fasciste français en 1936-1939 et l’un des deux principaux partis collaborationnistes en 1940-1944.

    En 1974 sort le livre de Marie Chaix intitulé « Les Lauriers du lac de Constance » qui traite de l’histoire du père, Albert Beugras.

     

     Vous y grimpiez par une échelle
    Qu'on installait dans l'escalier
    Finis tous vos jeux de marelle
    Et vos parties de chat perché
    Quand vous y montiez par surprise
    C'était en étouffant vos pas
    Il fallait alors porter Lise
    Et Sarah qui ne marchait pas

    Moi, j'ai le cœur tout barbouillé
    Quand vous parlez du p'tit grenier

    Quand on avait fermé la trappe
    Il fallait, on vous l'avait dit,
    Que pas un cri ne vous échappe
    Silencieux comme des souris
    Le plafond était tout en pente
    Et David se tenait penché
    On y voyait par quelques fentes
    Le ciel et un bout de clocher

    Moi, j'ai le cœur tout barbouillé
    Quand vous parlez du p'tit grenier

    Vous taire n'était pas facile
    Mais vous l'aviez bien vite appris
    Inventant des jeux immobiles
    Pour occuper les plus petits
    Parfois ce n'était qu'une alerte 


    Et vous pouviez dégringoler
    Bondir par la fenêtre ouverte
    Comme des cabris déchaînés

    Moi, j'ai le cœur tout barbouillé
    Quand vous parlez du p'tit grenier

    On vous avait mis à l'école
    Et vous aviez compris que vous
    Vous appelliez Georges et Nicole
    Sans jamais vous tromper surtout
    Ainsi se passait votre enfance
    Sans nouvelles de vos parents
    Vous ne mesuriez pas la chance
    Que vous aviez d'être vivants

    Moi, j'ai le cœur tout barbouillé
    Quand vous parlez du p'tit grenier

    Enfants, vous que partout les guerres
    Viennent broyer comme en passant,
    Vous qui semblez être sur Terre
    Pour payer la haine des grands,
    Qu'un jour on voie pourrir les armes
    Et les soldats inoccupés
    Que sur le ruisseau de vos armes
    Voguent des bateaux de papier

    Que plus jamais vous ne deviez
    Vous cacher dans des p'tits greniers

     

     

     

     


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    Le plus court chemin pour aller de mon petit village à Montréal,

    c'est de prendre le petit chemin qui longe la maison, serpente jusqu'à la forêt

    et tourne à droite.

    Après c'est tout simple, vous prenez tout droit. Vous pouvez pas vous tromper,

    c'est des grands immeubles comme à New York.

     

    Mail art - France Canada - Du village alsacien à Montréal

     

     


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    Le stress a un effet très important sur le cerveau des enfants qu’il peut modifier. Même s’il ne laisse pas de souvenir, il provoquera des symptômes envahissants et sera à l’origine de multiples troubles tout au long de la vie.

     

     

     


    A la suite du récit que j'ai publié, j'ai eu envie d'aller plus loin qu'un simple constat impuissant.

    J'ai entrepris des recherches qui aboutissent à la présentation d'extraits d'un article du Docteur, Muriel Salmona, présidente de l'Association Mémoire Traumatologique et Victimologie. Cette association créée en 2009 a pour objectif de  d'améliorer l'identification, la protection et la prise en charge des victimes de violences par une meilleure information du public et par la formation des professionnels impliqués, d'améliorer leur orientation et leur accès à des soins spécialisés de qualité, et aussi d'améliorer la connaissance et compréhension des conséquences des violences, dans l'optique de lutter contre toutes les violences et d'améliorer leur prévention.

    De l'article "Violences faites aux enfants", j'ai retenu:

    • les témoignages de sévices qui montrent la gravité des traitements infligés aux enfants,
    • leurs conséquences sur les comportements des enfants qui en sont l'objet,
    • les besoins de l'enfant,
    • l'inscription des traumatismes dans le cerveau et les répercutions sur le développement,
    • la construction de la mémoire traumatique,
    • la nécessité impérative de la protection.


    Récits d’enfance :


    « Les récits d'enfance de beaucoup de patients font froid dans le dos ! Ces récits décrivent des scènes de torture quotidiennes, des sévices physiques et sexuels, des actes de barbarie, des mises en danger réitérées, associées à des négligences et des violences psychologiques d'une cruauté incroyable. Pour la plupart de mes patients, les sévices remontent à leurs premiers souvenirs, déjà à 3 ans ils vivaient dans la terreur et ils n'ont ensuite connus que celle-ci, dans l'indifférence générale. Ils ont été confronté à une volonté systématique de les faire souffrir le plus possible, avec des mises en scène destinées à les terroriser et à les désespérer, de véritables tortures.


    Plusieurs patients m'ont rapportés avoir reçu en cadeaux de Noël ou d'anniversaire des fouets ou des martinets… nombreux sont ceux qui, en punition, devaient rester des heures à genoux les bras en croix ou sur la tête, enfermés dans une cave ou un placard dans le noir, attachés de longues heures, affamés ou obligés de manger des restes alimentaires avariés, passés sous des douches froides ou brulantes, exposés en plein froid, abandonnés, brulés avec des cigarettes. Certains étaient même réveillés en pleine nuit pour être injuriés, secoués et frappés violemment.


    D'autres devaient faire des travaux épuisants ou impossibles pour leur âge, et étaient transformés en esclaves corvéables à merci. Beaucoup ont eu de nombreuses fois peur de mourir : lors de mises en danger (conduite à risque routière en état d'ivresse, négligences graves) ; lors de menaces de mort explicites (verbales ou avec une arme, menaces de "suicide" collectif) ; lors de scénarios terrifiants inventés par des adultes pour faire peur (lors de maladie ou d'accidents où les adultes prédisent à l'enfant une mort certaine dans des souffrances atroce uniquement pour le terrifier, un père "s'amusait" à dire à une patiente quand elle avait six ans qu'il avait dans sa poche une bombe qui allait exploser dans trois minutes et il commençait le décompte…) ; lors de violences physiques extrêmes ou de viols ; lors de tentatives de meurtre (strangulation, étouffement, noyade, etc.).


    Conséquences :


    Ces enfants gravement maltraités vivaient continuellement la peur au ventre, peur de provoquer une colère, peur d'être tués, peur de se réveiller le matin, peur de rentrer à la maison après l'école, peur des repas, des week-ends, des vacances. Ils ont dû développer des stratégies hors norme pour survivre, en s'auto-censurant pour éviter toutes les situations à risque de dégénérer en violences, en se soumettant à tous les diktats des bourreaux, en se dissociant pour supporter l'insupportable en s'aidant de conduites à risque, en développant très souvent un monde imaginaire pour s'y réfugier, un monde imaginaire devenant parfois envahissant avec un compagnon imaginaire (poupée, peluche, animal, ami) à qui ils parlaient et qui souvent leur parlait, avec l'élaboration de romans familiaux (où l'enfant a d'autres parents) ou de romans d'aventure dont ils étaient les héros.


    Mais ces stratégies avaient leurs limites et les enfants pouvaient traverser des périodes de désespoirs intenses avec des idées et parfois des passages à l'acte suicidaires. Et souvent, ils n'ont pu en parler, que vingt, trente, voire plus de quarante ans après. À l'âge adulte, la mémoire traumatique de toutes ces violences est toujours là qui met en scène des terreurs, des désespoirs, des souffrances intolérables comme si elles étaient en train de se reproduire à nouveau, avec des sensations soudaines d'être projetés par terre, d'être écrasés, frappés violemment, de perdre connaissance, de mourir, d'avoir la tête ou le corps qui explose, avec des suffocations, des douleurs intenses.


    Et toutes les situations qui exposaient le plus à des violences comme les repas, les soins corporels, l'endormissement, les apprentissages, répondre à des questions, les week-ends, les vacances, les trajets en voiture, etc. deviennent redoutées, et sont susceptibles de provoquer bien des années après des angoisses ou des attaques de panique ou des conduites d'évitement. (…)


    Les besoins de l’enfant :


    L'enfant pendant ses premières années de vie a un besoin absolu d'un adulte qui assure ses besoins essentiel, sa sécurité, son bien-être matériel et affectif. L'enfant est en situation de dépendance physique, sociale, psychique et affective face au monde des adultes, toute violence ou négligence de la part des adultes va mettre en péril son développement psycho-moteur et sa relation au monde, le plonger dans une grande insécurité et le mettre en danger.(…)


    Violences et développement de l’enfant :


    Contrairement à ces fausses représentations, l'impact psychologique des violences sur les enfants est plus grave que sur les adultes, du fait de leur fragilité, de leur grande dépendance, de leur impuissance et de leur manque d'expérience face aux adultes, de leur immaturité à la fois physiologique et psychologique et de leur situation d'être en devenir, en pleine construction. L'immaturité du système nerveux central rend le cerveau des enfants beaucoup plus sensible aux effets du stress par l'intermédiaire de la sécrétion excessives de cortisol, avec des risques plus importants d'atteintes neuronales et plus particulièrement dendritiques, avec des morts neuronales, et des modifications épigénétiques de l'ADN des neurones ; certaines zones du cerveau comme le cortex pré-frontal limbique et l'hippocampe peuvent perdre de leur volume et rester atrophiées tant qu'il n'y a pas de protection mise en place et de prise en charge adaptée.


    Le système nerveux d'un enfant a une grande plasticité, des soins spécialisés permettent une très bonne récupération neuronale. Une autre des caractéristiques du cerveau d'un enfant de moins de deux ans est la grande immaturité de l'hippocampe, cette structure cérébrale sous-corticale qui est un véritable logiciel de la mémoire et des apprentissages. L'hippocampe est indispensable pour mémoriser des événements, intégrer des apprentissages et se repérer au niveau temporo-spatial, son immaturité fait qu'un enfant de moins de deux ans ne peut pas avoir de souvenirs de la période entre sa naissance et ses deux ans.


    Cette absence de souvenirs ne signifie pas pour autant qu'il ne puisse pas être traumatisé par des violences, tout au contraire car la structure cérébrale responsable des réponses émotionnelles, l'amygdale cérébrale, est active et fonctionnelle avant même la naissance (à partir au moins du 7ème mois de grossesse) ; il y aura donc une réponse émotionnelle qui sera encore plus intense que celle des adultes, les possibilités de la moduler étant bien moins importantes : le cortex cérébral qui est la structure modulante est moins performant car il a moins de capacités d'analyses et de ressources, de plus le cortex ne peut pas faire appel à l'hippocampe pour utiliser des apprentissages et des souvenirs très utiles pour mieux comprendre et analyser la situation de violence.


    Le circuit émotionnel sera donc beaucoup moins modulé, et risquera d'autant plus de se retrouver en "sur-voltage" entraînant de ce fait un risque cardio-vasculaire et neurologique (risque de toxicité neuronale et d'hyper-excitation de ceux-ci pouvant être responsable de crises épileptiques, de pertes de connaissance), le survoltage entraînant, par mécanisme de sauvegarde, le déclenchement d'une disjonction qui sera à l'origine d'une dissociation et d'une importante mémoire traumatique.
    Ces éléments rendent les enfants les plus jeunes très vulnérables aux violences. Même s'ils n'en ont pas le souvenir, ils en auront des symptômes envahissants par l'intermédiaire de la mémoire traumatique de ces évènements. Cette mémoire traumatique les colonisera en leur faisant revivre les mêmes émotions, sensations et douleurs que celles ressenties lors des violences. Leur développement psychique sera "infecté" par cette mémoire traumatique et par les stratégies de survie que l'enfant mettra en place pour y échapper ou l'anesthésier, et risquera d'entrainer des troubles de la personnalité, des troubles du comportements et des troubles cognitifs qui pourront, quand ils sont envahissants, être pris à tort pour des états psychotiques, des états limites, des troubles obsessionnels sévères, des troubles graves de l'attention, ou des débilités mentales, et traités comme tels, par méconnaissance des troubles psychotraumatiques.


    Après deux-trois ans, si l'hippocampe devient fonctionnel, les violences pourront aussi être oubliées en totalité ou en partie par une amnésie psychogène de survie assez fréquente (38% d'amnésie complète des violences sexuelles dans l'enfance dans l'étude de Williams, 1994).(…)


    Une protection impérative :


    Il est d'autant plus essentiel de protéger les enfants des violences et d'intervenir le plus tôt possible. Il s'agit de situations d'urgence pour éviter des psychotraumatismes sévères et chroniques avec de graves conséquences sur la vie future des enfants, sur leur santé, sur leur scolarisation et leur socialisation, et sur le risque de perpétuation des violences.(…)


    La société, en laissant perpétuer des violences « ordinaires » sur les enfants, qu'elle n'interdit et ne condamne pas suffisamment, porte une lourde responsabilité.(…)
    On ne manque jamais de vous assener ces « contre-exemples » résilients qui ont même bénéficié, selon eux, de ces violences subies pour être encore plus parfaits, pour encore mieux réussir, les violences les ayant « forgés », quel « merveilleux malheur », « merci Papa, merci Maman de m'avoir autant maltraité, grâce à vous, je suis quelqu'un de fort et de bien maintenant ! ».(…)
    L'enjeu de tout cela, c'est de prouver que ce qu'on nomme des violences ne sont pas graves pour tout le monde, qu'elles peuvent ne pas avoir de conséquences.

    Il est essentiel de lutter efficacement contre les violences faites aux enfants, les conséquences à court, moyen et long terme sur leur santé psychique et physique sont catastrophiques ; et les conséquences sociales à long terme sont catastrophiques également, car elles constituent le départ d'un véritable cycle de la violence. Il faut protéger les enfants et les soigner le plus tôt possible ; plus les soins sont précoces, plus ils sont efficaces et plus ils évitent des souffrances intolérables et des morts précoces. Il est hors de question de les abandonner à ces violences : sans prise en charge les enfants devront survivre comme ils peuvent et seront à grand risque d'échecs scolaires, de conduites addictives (tabac, alcool, drogues), de marginalisation, d'isolement social, d'exclusion, de délinquance. »

     

    Les chiffres choc de la maltraitance des enfants, le Parisien

     


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  •         Deux vieux poteaux de bois, un peu tordus, couleur passée

            S'appuient l'un sur l'autre comme deux vieux compagnons de route

            Ils tracent la limite d'une frontière rafistolée.

     

             Au sol

            Traces de résistants

            Pour qui la planète est une seule terre.

     

    traces d'oiseaux dans la neige

     

             Prairie blanche

             Empreintes

             Carrefour

             Rencontres

     

    Traces d'oiseaux dans la neige

     

             Dentelle ourlée au feston

             Les pattes ont tissé la neige

             La terre porte son napperon des jours de fête

     

    Suivre les traces

     

     

     


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  • Océan - Techniques mixtes

     

    Acrylique et huile en techniques mixtes - 0,40 x 0,40

     


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  • Heurt violent.

    Nuit.

    Rochers fracturés.

    Persiennes et rideaux baissés.

    Refuge douloureux.

    Secousses.

    Une voix.

    Une main.

    Une écoute.

    Des visites discrètes.

    Je ne suis plus seule dans ma nuit.

    Présence.

    Bienveillance.

    Accueil.

    La lumière pénètre la nuit.

    Merci.


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  • L'oiseau assoiffé de verticalité étudie le monde qui chavire.

     


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  • Le vieux se leva comme chaque matin. Il passa sa veste qui portait comme lui l’outrage des ans. Sa femme lui tendit la joue droite comme chaque jour depuis 60 ans. Elle l’avait maintenant un peu fripée comme si le baiser journalier y avait creusé son sillon. Il l’embrassa et demanda :

    « Et moi, j’y ai pas droit ? »

    «  C’que t’es bête ! lui répondit-elle comme tous les jours. Tu sais bien que ton tour vient après. C’est comme ça depuis qu’on s’connait. Et depuis qu’on s’connait tu fais semblant de rien. »

    Alors ils partent d’un rire commun ténu et chevrotant signe de ces nombreuses années de complicité.

    Et le voila sur le chemin de la boulangerie. Vouté et hésitant. Comme si le pied cherchait le relief sous la semelle sans grande certitude.

    Elle le regarde s’éloigner jusqu’au tournant, fait un geste du bras. Captivé par sa route et la traitresse des cailloux, il ne se retourne pas. Quand il a disparut, elle ferme doucement la vieille porte en bois. Les lézardes y écrivent le temps qui s’est assoupi là.

    Elle prend le balai pour nettoyer les tomettes rouges ternies. Faites à la main, elles retiennent la poussière et donnent bien du mal. Elles sont là depuis toujours, du temps où l’industrie n’existait pas encore.

    Elle sort trois carottes qu’elle épluche. Va chercher deux pommes de terre et un oignon. Elle prend maintenant le morceau de porc et la marmite en fonte. Elle fait revenir l’oignon et la viande. Et met en route le ragoût.

    Elle a fini de lancer le frichti. Il devrait arriver. C’est le temps qu’il lui faut pour être de retour. Elle va ouvrir la porte. Inquiète, elle ne le voit pas, même au tournant.

    Depuis toujours, il arrive quand elle est en train d’éplucher les légumes. Il arrive après la mise en route de la cuisson s’il y a exceptionnellement plus de monde chez le boulanger.

    Alors elle reste là sur le pas de la porte, les bras ballants, le souffle comprimé. Elle sent les battements de son cœur à sa tempe. « Pourvu qu’il ne lui soit rien arrivé. » Elle sent ses jambes lourdes et une grosse fatigue lui tomber dans les yeux. Elle cherche une chaise qu’elle traine lourdement devant la porte. Commence l’attente.

    Huit coups sonnent à l’église du village, là-bas derrière le tournant.

    Elle voit en surgir le petit Damien. Il marche vite, courant par moment. C’est curieux, elle ne la jamais vu par ici. Elle le voit qui se rapproche de son pas irrégulier, comme s’il était à bout d’efforts. Et puis le voila, là, à portée de parole. Elle se lève.

    « Bonjour Mamie, dit-il. C’est le père qui m’envoie. Pour dire que le Papi, il est tombé. Ils ont appelé les secours. Ils attendent qu’ils arrivent. »

    Un bourdonnement envahit la tête de la vieille dame. Des tâches noires dansent devant ses yeux. Elle s’assied. Tête baissée. Une larme. Ses mains tremblent…

    Damien se déhanche. D’un pied sur l’autre. Il est malheureux. Ne sait que faire. Quelques minutes passent. Sans fin.

    Alors Mamie, qui n’est plus allée au village depuis bien des lustres, met ses chaussures. Damien proteste. « Non, Mamie, ne bougez pas. Dès que la fournée du pain est terminée, mon père va venir. »

    Mamie prend une canne du Papi, un peu trop longue pour elle.

    « Donne-moi le bras Damien. C’est le mieux que j’ai à faire. Je ne peux pas rester ici, sans savoir. Je ne le supporterai pas.» Elle se met en route.

    La vieille femme et l’enfant cheminent de concert jusqu’au tournant, doucement parce que plus, ce n’est plus possible.

    C’est alors que se présente Alfred dans sa voiture.

    « Viens Mamie, dit-il, monte que je te mène. » Il la dépose au village chez lui. Emilie , sa femme, lui propose la goutte et quelques gâteaux. Mais elle s’impatiente :

    « Mais qu’est-ce qu’il a le Papi, à la fin. Pourquoi vous me dites rien. »

    « Mamie, le médecin est venu. Il n’y a plus rien à faire. Il a fait un infarctus. »

    Alors Mamie se vide de son sang, devient blafarde. Son souffle reste suspendu. Ses yeux deviennent vides. Une longue plainte sourde s’élève de sa poitrine.

    Alors l’Emilie la prend contre elle, la berce doucement adoptant la même plainte. Et le cœur de la vieille femme fait sourdre toute sa douleur dans ce long hululement où elle rencontre la souffrance de l’Emilie de la voir dans une telle détresse.


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  • La forêt de marches s’enroule sur ses arrêtes taillées à la serpe,

    soulignées d’un trait sombre.

    Une poudre d’ocre a déposé sa douceur naturelle

    sur les aspérités rugueuses comme un voile ténu.

    La déchirure du charbon barre l’aménité diffuse.

    La force mâle déploie sa puissance de colonne.

    La lumière joue avec la glèbe.

    C’est le temps de la terre.

     


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